De l’IGR à 52% de 1990 à... l’IR à 38% d’aujourd’hui


Depuis son institution en 1990, l’impôt sur le revenu a connu une série de changements. Le premier a eu lieu en 1993. Réduction du taux marginal d’imposition, relèvement du seuil exonéré, instauration de déductions et d’abattements... Quasiment toutes les mesures ont été bénéfiques au contribuable.

L’impôt général sur le revenu (IGR), appellation transformée en 2006 en Impôt sur le revenu (IR), a subi un nombre important de changements au cours des vingt dernières années, que ce soit au niveau des taux et des tranches d’imposition ou des différentes déductions et exonérations. Les principales mesures concernent l’IGR (ou l’IR) dans sa globalité, c’est-à-dire le revenu global imposable d’une personne physique, quelle que soit la catégorie du revenu qu’elle perçoit. Cela dit, des mesures spécifiques ont concerné certains types de revenus, notamment les revenus salariaux, fonciers et de capitaux mobiliers. Pour les revenus professionnels, ils ont connu des changements considérables sur le plan fiscal, mais que nous ne traiterons pas car il s’agit d’activités professionnelles menées dans la plupart des cas dans le cadre d’entreprises. Quant aux revenus agricoles, ils étaient exonérés pendant les vingt dernières années, et cet avantage restera en vigueur, sauf prorogation, jusqu’à fin 2013.
Notons d’abord que jusqu’à la fin des années 80, l’IGR n’existait pas sous sa forme unifiée qu’on connaît maintenant. Ce n’est qu’en 1990 qu’une loi (n° 17/89) a institué cet impôt en remplacement de cinq impôts cédulaires : l’Impôt sur les bénéfices professionnels (IBP), le Prélèvement sur les traitements et salaires (PTS), la Contribution complémentaire sur le revenu global des personnes physiques (CCRGPP), la Taxe urbaine (TU) sur les revenus locatifs et l’Impôt agricole (IA).
La tranche exonérée de l’IR n’était que de 12 000 DH contre 30 000 DH actuellement
A cette époque, le taux marginal (taux d’imposition de la tranche supérieure du revenu) était de 52% et la tranche exonérée du revenu de 12 000 DH par an (contre 38% et 30 000 DH actuellement). Et c’est en 1993 que le barème de l’IGR a connu sa première modification, notamment la suppression du taux marginal de 52% pour ne laisser que le taux de 48% de l’avant dernière tranche de revenu, et le relèvement du seuil d’exonération de 12 000 à 15 000 DH. Une année plus tard, le barème a de nouveau été revisité : le seuil d’exonération a été relevé à 18 000 DH et le taux marginal abaissé à 46%.
Durant la même année, deux mesures spécifiques ont bénéficié à certains contribuables. La première a été l’abaissement à 17% au lieu de 45% du taux applicable aux produits des droits d’auteur, avant leur exonération totale, en 1994, pour ce qui concerne les personnes résidentes. La deuxième mesure a concerné les retraités et personnes percevant des rentes viagères dans la mesure où le taux d’abattement forfaitaire applicable au montant brut imposable de ces revenus a été relevé de 25% à 35%. Ce même avantage a été étendu, en 1995, aux produits de l’assurance-retraite.
En 1997, le barème de l’IGR a connu sa troisième série de changements. Le taux marginal a été abaissé de 46% à 44% pour la tranche du revenu supérieure à 60 000 DH, et les autres taux du barème ont été réduit d’un point.
En concédant ces réductions, le fisc a introduit, le législateur a érigé, la même année, les principaux cas de fraude en matière d’IGR en infractions pénales passibles de peines pécuniaires allant de 5 000 à 50 000 DH et, en cas de récidive, de peines d’emprisonnement allant de 1 à 3 mois. Ces peines ont été introduites indépendamment des sanctions fiscales en vigueur à l’époque, notamment l’amende de 500 DH en cas de dépôt tardif de la déclaration par les assujettis autres que les salariés (mesure adoptée en 1990).
Trois ans plus tard, soit en 2000, le seuil d’exonération de l’IGR a été relevé de 18 000 à 20 000 DH, et la déductibilité des charges familiales (180 DH par an et par personne à charge) a été étendue aux personnes âgées de plus de 21 ans (jusqu’à 25 ans) et percevant un revenu annuel global inférieur ou égal à la tranche exonérée. La même année, la taxe sur les produits des actions, parts sociales et revenus assimilés ainsi que la taxe sur les produits de placements à revenu fixe ont été intégrées dans l’IGR. Le législateur a en parallèle décidé d’affecter 1% des recettes de l’IGR au profit des régions. En 2011, la Taxe sur les profits immobiliers (TPI) et la taxe sur les profits de cession des valeurs mobilières ont été intégrées dans l’IGR.
Et ce n’est qu’en 2007 qu’un nouveau réaménagement du barème de l’IR a eu lieu. La tranche exonérée a été relevée de 20 000 à 24 000 DH, et le taux marginal a été réduit de 44% à 42% pour les revenus dépassant 120 000 DH par an. Les tranches intermédiaires ont également été revisitées.
La déduction pour charges de famille relevée de 180 à 360 DH en 2009
Deux ans plus tard, le seuil exonéré est passé à 28 000 DH et le taux marginal à 40% pour la partie du revenu dépassant 150 000 DH. En même temps, la déduction annuelle pour charge de famille a été relevée de 180 DH à 360 DH par personne à charge et une seule limite d’âge a été adoptée, à savoir 25 ans au lieu de 21 et 25, pour bénéficier de cette réduction. En ce qui concerne la déduction des intérêts des prêts contractés pour la construction d’un logement principal, le délai pour le dépôt de la demande de déduction a été prorogé à 7 ans au lieu de 4 ans à compter de la date de délivrance de l’autorisation de construire. Et en matière d’assurance-retraite, la durée du contrat ouvrant droit à la déduction des cotisations et primes versées ainsi qu’à l’exonération des prestations à l’échéance a été réduite de 10 à 8 ans.
En 2010, le barème de l’IR a connu sa dernière modification : le seuil d’exonération a été relevé à 30 000 DH et le taux marginal abaissé à 38% pour la tranche du revenu dépassant 180 000 DH. Les tranches intermédiaires ont également subi des modifications. Par ailleurs, au même titre que les prêts classiques pour l’acquisition ou la construction d’un logement principal, la déductibilité de la rémunération convenue d’avance dans le cadre des contrats Mourabaha pour l’acquisition d’un logement principal a été permise.
Hormis ces mesures qui ont concerné l’impôt sur le revenu dans sa globalité, quelle que soit la catégorie du revenu, plusieurs autres ont été adoptées durant les vingt dernières années concernant des revenus spécifiques, notamment les salaires.
En 1992, un taux d’IGR de 45% a été fixé pour les rémunérations versées aux personnes ne faisant pas partie du personnel de l’entreprise, avant que ce taux ne soit réduit à 30% en 1997. Pour les enseignants ne faisant pas partie du personnel permanent d’un établissement public ou privé, un taux préférentiel de 17% a été accordé.
En 1993, le personnel navigant technique et commercial de l’aviation marchande a bénéficié d’un abattement forfaitaire au taux de 45% plafonné à 24 000 DH. Et depuis 2000, le revenu imposable des ouvriers d’imprimerie travaillant la nuit et des ouvriers des mines bénéficie d’un abattement de 35%. Ce taux a été fixé à 40% pour les pensions et rentes viagères et à 45 % du revenu imposable des journalistes, rédacteurs, photographes et directeurs de journaux.
En 2001, il y a eu l’institution des stocks-options afin de développer l’actionnariat des salariés. A ce titre, l’exemption de l’abondement supporté par la société attributaire d’option de souscription ou d’achat d’actions à ses salariés a été instaurée, à condition que l’abondement ne dépasse pas 10% de la valeur de l’action et que la cession des actions n’intervienne qu’après 5 ans de la date de leur acquisition. En 2008, ce régime a été simplifié en rendant les stocks-options nominatifs et en réduisant la période d’indisponibilité des actions de 5 à 3 ans avec possibilité de réduction de ce délai en cas de décès ou d’invalidité du salarié.
L’indemnité de départ volontaire exonérée en 2004
En 2004, l’indemnité de départ volontaire (dans la limite de l’indemnité de licenciement en vigueur) et toutes les indemnités pour dommages et intérêts accordées par les tribunaux en cas de licenciement  ont été exonérées. La même année, il y a eu la déductibilité des intérêts sur les prêts accordés par les œuvres sociales des secteurs public et privé.
Puis, en 2006, le plafond d’exonération de l’indemnité de stage a été relevé de 4 500 DH à 6 000 DH dans le secteur privé, pour une période de 24 mois renouvelable et pour une durée de 12 mois en cas de recrutement définitif.
En 2009, l’abattement pour frais professionnels a été relevé de 17% à 20% plafonnés à 28 000 DH par an au lieu de 24 000 DH. Ce plafond a été porté à 30 000 DH en 2010.
Enfin, en 2011, l’exonération de l’indemnité de stage a été prorogée jusqu’à fin 2012, et une imposition préférentiel au taux de 20%, valable pour une durée de 5 ans à compter de la prise de fonction, a été instaurée en ce qui concerne les revenus salariaux perçus par les salariés travaillant dans des sociétés ayant le statut «Casablanca Finance City».
Fiscalité : Comment a évolué la fiscalité des revenus des capitaux mobiliers
La fiscalisation des bons et obligations émis ou garantis par l’Etat n’a eu lieu qu’en 1994, selon le barème de l’IGR à l’époque. Et ce n’est qu’en 1997 qu’une taxe de 10% sur les profits nets des cessions d’actions ou parts sociales a été instituée, avec une exonération si le montant de la cession ne dépasse pas 20 000 DH au cours d’une année.
En 2000, l’imposition des revenus des actifs financiers a été mieux encadrée : IR de 20% sur les profits de cession des obligations et autres titres de créance et d’actions ou parts d’OPCVM investis à hauteur de 90% au moins en obligations ; de 10% sur les profits de cession des actions et autres titres de capital ainsi que les parts ou actions d’OPCVM investis à hauteur de 60% au moins en actions ; et IR de 15% sur les profits de cession des actions ou parts d’OPCVM ne relevant ni des actions ni des obligations (fonds diversifiés).
Entre 2002 et 2005, les profits de cession des actions cotées en Bourse et les actions et parts d’OPCVM investis à hauteur de 85% au moins en actions cotées ont été totalement exonérés. Et, en 2007, le seuil d’exonération des profits mobiliers a été porté à 24 000 DH.
En 2008, le taux d’imposition des profits de cession des actions a été porté de 10% à 15% et celui de tous les OPCVM a été fixé à 20%. Cette mesure a été rectifiée en 2009 en ramenant le taux à 15% pour les OPCVM investis en actions. Cette même année, le seuil d’exonération des revenus mobiliers a été relevé à 28 000 DH, avant de passer à 30 000 DH en 2010. Par ailleurs, le taux d’imposition des profits de cession d’actions non cotées a été relevé à 20%.
Enfin, en 2011, les plans d’épargne actions, logement et éducation introduits par la Loi de finances de la même année ont été défiscalisés à hauteur des plafonds de placement autorisés (respectivement 600 000 DH, 400 000 DH et 300 000 DH), à condition de conserver l’argent déposé pendant une durée de 5 ans.
Souhaïl Nhaïli. La Vie éco2012-01-10

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