L’économie fiscale revient de plein droit au salarié
· La rémunération étant réputée brute dans le contrat de travail
· L’impact sera visible dès la fiche de paie de janvier 2009
· Des récalcitrants dans le textile, le travail temporaire et les centres d’appels
C’est l’un des sujets de discussion du moment dans les entreprises et la principale attente des milliers de salariés, notamment ceux qui sont au bas de l’échelle (et même au-delà): la baisse de l’impôt sur le revenu introduite dans la loi de Finances 2009 sera-t-elle répercutée sur le bulletin de paie? Normalement, c’est sur la fiche de paie du mois de janvier 2009 que l’impact pécuniaire de la baisse des taux de l’impôt sur le revenu sera visible, mais cette automaticité n’est pas acquise partout.
Contre toute évidence et en dépit de la clarté de la loi, les positions des employeurs et des experts ne sont pas tranchées sur la question. Ce doute -qui ne doit pas exister en réalité- concerne surtout les petites entités, voire des PME d’une certaine taille ainsi que des secteurs à forte intensité de main-d’œuvre: textile, centres d’appels, BTP et construction. Parmi les plus exposés également, les salariés employés au CDD dans les entreprises de gardiennage et de sécurité, des personnes qui émargent pour l’essentiel au Smig.
Pour les «petits» salaires, même limité, ce gain fiscal dû à la baisse de l’IR est non négligeable. Et ils sont nombreux. Selon les statistiques de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), 40% des 2,5 millions de salariés déclarés dans ses registres ont un salaire équivalent au Smig mensualisé (autour de 2.000 dirhams nets par mois, soit en gros, 2.928 dirhams bruts et donc 35.136 dirhams, rapportés à l’année).
Pour certains employeurs, la tentation de profiter de l’aubaine pour réduire les coûts du travail et améliorer leur marge est forte.
Pourtant, le principe lui, ne souffre d’aucune ambiguïté: l’économie fiscale résultant du relèvement du seuil de revenu exonéré, de la baisse des tarifs et de la révision des tranches de l’IR, revient de plein droit au salarié. Au regard de la législation du travail, la rémunération d’un salarié est réputée brute et toute baisse du taux de l’impôt sur le revenu doit donc lui bénéficier de droit. L’Etat a renoncé à une moins-value en recettes à court terme de manière à donner un coup de pouce au pouvoir d’achat des salariés.
A contrario, dans l’hypothèse où le législateur décidait un jour d’augmenter le taux de l’IR, c’est le salarié, et lui seul, qui en subira les conséquences en voyant sa rémunération nette baisser. Ce scénario, qui n’est pas qu’une vue d’esprit, s’est déjà produit dans les années 1980 lorsque fut institué le PSN (prélèvement de solidarité nationale) en sus de la taxe sur les salaires.
C’est bien donc le salarié qui supporte le poids de l’IR et non l’employeur, contrairement à une idée que défend encore aujourd’hui une partie du patronat dans le textile-habillement. C’est ce courant qui s’était opposé à l’idée de la baisse de l’impôt sur les sociétés qu’avait obtenue l’état major de la CGEM, baisse applicable aux résultats réalisés à partir de l’exercice 2008. L’employeur n’a que le rôle de collecteur de la recette vis-à-vis du Trésor, comme il l’est aussi au regard d’autres prélèvements obligatoires (assurance maladie, accident du travail, cotisations retraite, etc.). «Il est normal que la baisse de l’IR profite au salarié», explique Zouhair Amrani, directeur général de Best Interim.
Il n’est pas acquis que toutes les PME adoptent le même comportement, quitte à se mettre en porte-à-faux avec la loi. Bien de chefs d’entreprise pourraient être tentés d’assimiler cette baisse de l’IR à une augmentation de salaire, et donc, renoncer à toute revalorisation des salaires de leurs collaborateurs en 2009.
Que feront les syndicats?
Il faudra donc surveiller l’attitude qu’adopteront les entreprises dans des secteurs comme le travail temporaire, le gardiennage et la sécurité, le textile, les centres d’appels, le BTP, des activités (pas les seules) où les employeurs ont souvent tendance à prendre des libertés avec le droit social en imposant à leurs employés des conditions de travail d’un autre âge. Voilà une opportunité qui s’offre aux syndicats pour prouver leur utilité.
Il reste un autre cas sur lequel les experts sont divisés: qu’adviendra-t-il des cadres qui ont négocié des salaires nets à la signature de leur contrat de travail? Deux écoles s’affrontent sur la question de la répercussion de la baisse des taux de l’IR: La première estime que le contrat de travail doit mentionner le salaire brut, et par conséquent, le salarié doit bénéficier de l’économie fiscale résultant de la baisse du tarif de l’IR. La deuxième estime qu’à partir du moment où l’employeur respecte les termes du contrat (en versant le salaire net convenu), rien ne l’oblige à répercuter cette économie sur la fiche de paie de son collaborateur. Dernière précision: le contenu du contrat de travail ne peut pas être en dessous de ce que dit la loi. A bon entendeur.
Ce qui est dans la loi de Finances
Au 1er janvier 2009, le seuil de revenu exonéré de l’impôt sera porté à 28.000 dirhams bruts annuels contre 24.000 précédemment. Le taux marginal d’imposition baissera de deux points, à 40% au lieu de 42% pour les tranches supérieures à 150.000 dirhams. La déduction pour charge familiale est portée à 360 dirhams (contre 180 actuellement) par personne dans la limité de six, soit un maximum de 2.160 dirhams. Enfin, le taux des frais professionnels passe à 20% du salaire brut plafonné à 24.000 dirhams.
leconomiste
Abashi SHAMAMBA
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